Colmar : Le 20e by Reecht, « Un rêve devenu table »

Un rêve d’ado devenu table. À quelques centaines de mètres du centre historique de Colmar, les frères Reecht reprennent le 20e des Hablitz et le rebaptisent Le 20e by Reecht. Il fallait oser : ouvrir un restaurant du soir, dans une ville où la nuit tombe souvent sur des portes closes. Résultat : un lieu à mi-chemin entre bistrot chic et ferme moderne. Au mur, le bleu profond donne le ton. Dans la salle, des objets chinés, des rhums arrangés, une atmosphère décontractée mais soignée, et surtout… deux frères qui ont mis leur terroir au cœur de l’assiette.

Xavier et Pierre Reecht, enfants d’Horbourg-Wihr, ont tout misé sur l’authenticité. Le premier, formé à la terre comme son papa, s’est lancé en cuisine avec une belle énergie d’autodidacte. Le second, passé par les caves où il a élaboré des vins, connaît ses flacons sur le bout du nez. Il est en salle, cause juste, conseille bien, et fait parler les bouteilles comme un vieux sommelier de famille. Ensemble, ils signent une table vivante, enracinée.

Leur credo ? Du champ à l’assiette, du verre à la terre. Les légumes, les œufs, les herbes viennent de leur ferme familiale ; les viandes sont choisies avec soin, les vins pensés pour sublimer chaque plat. Et lorsque ce n’est pas eux, ce sont d’autres producteurs alsaciens qui partagent leurs valeurs.

Mais l’âme de cette maison s’est aussi forgée en voyage, surtout dans le Sud-Ouest, où les frères Reecht ont découvert le cochon noir de Bigorre, le plumat de cochon, le foie gras travaillé avec finesse et respect. Une révélation gourmande qui a nourri leur projet, leur carte, et leur envie de lier terroir alsacien et inspirations gasconnes.

Dans l’assiette, ça parle vrai : tartare de veau au citron vert, terrine de foie gras, canoës de moelle à la fleur de sel. En plat, on ne boude pas la poire de bœuf façon Rossini, tendre à souhait, ni la côte de bœuf maturée 28 jours, pensée pour les amateurs. Il y a aussi un poisson du moment, accompagné de tagliatelles de légumes parfumés à l’ail, au persil, à la ciboulette. Des assiettes simples mais affirmées, comme une déclaration d’amour à leur terre.

On commence souvent par une mise en bouche qui donne le ton : carpaccio pastèque-melon, ou écrasé de brocolis au gorgonzola. Et cette entrée du moment, tout en fraîcheur, autour de cinq variétés de tomates.

Les desserts, eux, ne trichent pas non plus : assiette de fromages d’Alsace sourcés chez le voisin Mathieu (bleu, gouda, tomme, munster…), chocol’orange en feuillantine et sorbet cacao, ou encore ce moelleux “explosion caramel”, traversé de beurre salé, à faire frémir les plus sages.

Bref, le 20e, c’est une maison de copains qui travaillent sérieusement sans se prendre au sérieux. Une table du soir à Colmar, vivante, locale, pensée comme une auberge moderne où l’on mange bien, on boit juste, et où l’on revient avec joie.